Bilinguisme: pourquoi ça marche? (ou pas…)

Bilingue, oui je peux dire que ma fille est totalement bilingue. Et non, non ce n’est pas dû à la chance comme certains me disent parfois!
Autour de moi, j’ai beaucoup d’exemples de famille dans lesquelles ça ne fonctionne pas ou mal, le schéma habituel étant: l’enfant comprend l’autre langue mais ne la parle pas ou très peu, et malheureusement aussi des exemples où la langue est complètement abandonnée autant par les enfants que par les parents.

Alors je me suis souvent posée (et on me pose aussi souvent) la question . Qu’est-ce qui fait que ça marche? Quels sont les éléments manquants dans une famille où ça ne fonctionne pas? Pourquoi ma fille parle automatiquement français avec moi, sans l’ombre d’une hésitation, en privé comme en public, alors que pour d’autres enfants il faut forcer, insister, négocier pour avoir un mot dans la deuxième langue?

Lien, Soutien, Echange, Besoin, Constance, Temps
Je ne suis pas linguiste professionnelle mais mes lectures, mon expérience et les exemples que je connais me donnent quelques indices (personnels) de réponses. Je crois que plus les éléments suivants sont réunis,plus il est facile d’arriver à un bilinguisme « réussi » (=bilinguisme actif, c’est-à-dire que l’enfant parle la langue quotidiennement):

L’attachement à la langue

Transmettre une langue c’est transmettre son enfance et ses souvenirs, c’est finalement transmettre un peu de sa propre vie. Non, il ne s’agit pas seulement d’enseigner des mots mais bien d’une transmission. En général l’enfant acquiert la compréhension d’une langue assez facilement si on l’utilise avec lui régulièrement. Par contre pour qu’il parle cette langue, je crois qu’il doit y percevoir un certain attachement, un lien affectif à la langue de la part de la personne qui l’utilise.

Le soutien.

Je pense qu’il est  très important que la famille, les proches acceptent totalement le choix des parents. Je connais des couples ou l’un ne comprend pas totalement que l’autre utilise une autre langue. C’est malheureusement souvent synonyme d’échec. Il faut absolument être d’accord, se soutenir, avoir les mêmes intentions dans le couple ou la famille. Et à défaut d’être compris, au moins que l’entourage accepte sans conflit ni critique! Cela parait évident pour certains mais je vois malheureusement autour de moi et encore aujourd’hui beaucoup d’exemples où il y a une incompréhension certaine. Certains clichés sont tenaces (l’enfant va parler tard, il aura des problèmes à l’école, c’est malpoli… etc. ) L’enfant ressent bien sûr ces désaccords et si ce n’est pas clair pour les adultes, il se posera lui aussi des questions.

Les échanges

Un autre point indispensable à l’acquisition d’une langue est qu’il y ait une forme de communication. Écouter une langue ne suffit pas, il faut s’exprimer et échanger avec.
Les enfants sont incroyables lorsqu’il s’agit de comprendre, ils ont une capacité de déduction fantastique. Plus l’enfant est petit, plus il est attentif à l’intonation, à nos gestes, nos déplacements, nos regards, nos mimiques. Il comprend assez vite ce qu’on attend de lui. Les parents ou les professeurs ont parfois l’impression que les mots sont compris, que la parole a joué le rôle important dans l’échange, alors que souvent l’enfant a compris par le contexte, le geste ou l’intonation. Il ne faut donc pas confondre cette compréhension avec un échange linguistique. Pour acquérir la langue l’enfant doit communiquer avec, s’en servir, ce qui nous amène à la notion de besoin.

Le besoin

Pour être utilisée, la langue doit être utile. L’enfant doit avoir besoin de la langue pour s’exprimer. Là le rôle de l’entourage, des grands-parents, cousins, amis est important. Dans notre cas, la famille de maman ne parle que français et la famille de papa ne parle qu’espagnol. Les deux langues sont donc indispensables pour communiquer avec tout le monde. Cela se fait « naturellement » comme on dit, mais quelquefois il y a certains efforts à fournir. Dans les exemples que je connais, j’ai remarqué que la langue des grands-parents ou des cousins est importante et que le bilinguisme se met plus facilement en place lorsque ces personnes tiennent une place importante au quotidien (visites, messages, vacances etc…) et évidemment s’ils ne comprennent pas l’autre langue. S’il en a besoin, l’enfant utilisera la langue. Il y a beaucoup de cas d’enfants qui commencent à parler la langue seulement lorsqu’ils se retrouvent en vacances dans l’autre pays, quand ils se retrouvent dans une situation où c’est la seule manière d’être compris.

La constance

Il faut rester constant dans ses décisions. Tenir le coup comme on dit (en français 😉 ) Quoiqu’il arrive, malgré des réflexions désagréables ou des incompréhensions totales, il faut être certain qu’on fait ce qu’il faut, même en public! C’est parfois difficile et on vit parfois des moments compliqués mais on ne baisse pas les bras et on insiste! On met les choses au clair parfois avec certaines personnes et on continue. Chez le médecin, devant l’instit ou les parents des copains, on continue à s’adresser à l’enfant dans la langue même si cela dérange les autres parfois. Malgré les commentaires, les regards et les critiques, on assume ses choix. Je crois que ce point est un des plus compliqués à respecter pour certains car c’est loin d’être facile.

Le temps

Enfin, le temps passé à utiliser la langue est évidemment important. Quelques heures par jour, des séjours longs avec des locuteurs, des médias dans l’autre langue… chacun fait comme il peut mais un minimum de temps est indispensable, certains parlent de 30% du quotidien au moins…Mais pas seulement d’écoute, n’oublions pas les autres éléments….constance,besoin, échange….etc.

N’hésitez pas à commenter cet article et à partager vos observations ou expérience personnelle !

 

 

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Une réflexion sur “Bilinguisme: pourquoi ça marche? (ou pas…)

  1. stephanie février 10, 2017 à 9:51 Reply

    Excellent article!

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